Le foie gras, mets français par excellence, est menacé par l’ influenza aviaire hautement pathogène (IAHP). Consciente de son importance culturelle et économique, la France s’est lancée dans une mission ambitieuse: vacciner un nombre impressionnant de 64 millions de canards. Au cours des trois dernières années, l’IAHP a fait des ravages dans le secteur avicole français, nécessitant l’abattage d’environ 30 millions de volailles. L’impact qui en a résulté a conduit les agriculteurs à réduire la densité d’oiseaux dans leurs exploitations, ce qui a entraîné une baisse significative de 35 % de la production de foie gras l’an dernier seulement. La nécessité d’une mesure préventive à grande échelle est devenue évidente.
Relever ce défi, en particulier pour les fermes abritant plus de 250 canards, nécessite un programme de vaccination méticuleux. Le protocole, tel que décrit par la Fédération française du foie gras, exige que les canetons reçoivent leur première dose de vaccin dix jours après l’éclosion, suivie d’un rappel huit jours plus tard. «Cette démarche sauvegarde non seulement nos oiseaux mais aussi notre patrimoine culturel», affirme la directrice de la fédération Marie Pierre Pé.
Bien que la campagne de vaccination coûte 102 millions de dollars, le gouvernement français s’est engagé à assumer 85 % des dépenses. Pour mettre cela en perspective, ce coût représente moins d’un dixième de ce qui a été versé aux agriculteurs lors des abattages d’oiseaux de 2021 et 2022. La démarche de la France est sans précédent au sein de l’ Union européenne, pionnière dans une approche préventive contre l’IAHP. Mais cela n’a pas été sans répercussions internationales.
En réponse, le ministère américain de l’Agriculture a décidé de limiter les importations de volaille en provenance d’Europe en septembre dernier. La décision de l’USDA est ancrée dans une préoccupation majeure: les oiseaux vaccinés pourraient ne pas présenter de symptômes d’IAHP, ce qui présente un risque d’exporter par inadvertance des animaux vivants infectés ou des produits contaminés vers les États-Unis. Si la campagne de vaccination donne la priorité à la protection d’un mets national, elle souligne également les défis plus larges liés à la sécurité alimentaire mondiale et à la dynamique du commerce intercontinental.